« Je salue l’ouverture de ce débat qui me semble plus serein que celui que nous avons eu tout à l’heure sur la question budgétaire. J’insisterai sur quatre points :
Le premier point est politique. Il faut revenir sur l’histoire, le vice originel, si j’ose dire, de ce dossier : la décision prise isolément par quatre maires sur un dossier qui, à l’époque, n’a pas fait du tout l’objet d’une concertation ni d’un débat tel que celui que nous avons ce soir. Cette décision prise par ces quatre maires porte une responsabilité importante sur l’ensemble des difficultés que nous avons rencontrées ces 20 dernières années.
J’insiste sur ce point et pourtant vous ne parlez pas de la concertation en tant que telle dans votre vœu, ce que je trouve dommage. Au final, il n’y a pas de bon choix, il n’y a qu’un moins mauvais choix qui puisse être accepté par l’ensemble des parties prenantes. En débattre politiquement, c’est important. Susciter une réflexion des habitants, des riverains, et faire en sorte qu’ils puissentprendre part et dire comment ils peuvent eux-mêmes vivre avec les solutions proposées est tout aussi important.
Le SAGYRC est un outil complexe, il a été créé comme un syndicat à option ce qui, à mon avis, était une bonne chose sur le plan technique, mais une mauvaise sur le plan politique. Cela a largement amoindri la capacité de solidarité de l’ensemble des communes et a rendu les choses beaucoup plus complexes. La compétence GEMAPI portée par la Métropole ne nous simplifie pas non plus les choses : les communes sont largement privées de leur capacité d’influence quant à la protection des inondations, puisque la Métropole porte maintenant cette compétence.
Le deuxième point est technique : quel est le niveau de protection effectif et acceptable pour la population. Le niveau trentennal est-il un niveau pertinent ? Très sincèrement, je ne suis pas un technicien, je n’en sais rien et je pense que les techniciens n’en savent pas grand-chose non plus. Peut-on faire un pronostic sur le niveau de crue que nous aurons dans les décennies à venir ? Je crois que l’on est incapable de le faire. Au final, le niveau de protection comme celui du risque que l’on est capable d’accepter pour la population ; c’est effectivement un choix politique et cela doit forcément être quelque chose de très largement partagé. J’insiste sur ce point.
Là aussi le vœu est tout à fait critiquable parce qu’il évoque des alternatives, mais sans nommer lesquelles. S’il s’agit uniquement de réduire le niveau de protection, on devra faire un barrage, certes plus petit, mais un barrage quand même. On ne fera que déplacer le problème ; le déboisement sera sans doute moins grand, les enrochements prélevés, et donc les tirs de mines, moins importants. Il y aura un ouvrage à concevoir parce qu’en l’état du dossier tel que je le comprends, les techniciens ne proposent pas d’autre alternative pour la protection centennale.
Le troisième point est humain. Au regard de ce que vivent les riverains, quel sera le système d’alerte, le système de prévention et les moyens d’éducation à la vie avec la crue. Ces dossiers ont été très peu travaillés jusqu’à présent. Pour ceux qui vivent dans cette vallée, on sait que les bâtiments les plus anciens sont des bâtiments qui résistent relativement bien à la crue parce qu’ils ont été conçus comme cela. Parce que le mode d’habitation a permis de ne pas sur-saturer en surfaces habitables les rez-de-chaussée pour qu’ils soient inondables sans dégâts. Les maisons construites depuis une cinquantaine d’années n’observent plus ces principes, c’est là qu’il y a des risques importants autant sur les biens que sur les personnes.
Le dernier point est territorial. Ce débat ne concerne pas uniquement Francheville mais l’ensemble des communes du bassin versant. En cas de grande crue, les dommages les plus importants seront sur les communes en aval, principalement Ste Foy et Oullins. Nous avons une responsabilité collégiale et collective au regard des risques qui sont pris par d’autres. Il est clair que ce débat est largement kidnappé par des préoccupations politiques, voire politiciennes que l’on peut renvoyer à chacun d’entre nous. Vous avez fait un kidnapping sur ce dossier, nous l’avons fait à notre tour. Chacun l’a fait. C’est un jeu politique naturel et normal, mais il est particulièrement dommageable pour la sérénité de notre réflexion et la capacité d’être objectif au débat.
J’en appelle à un vrai travail collectif sur le dossier. Là, nous intervenons sur un vœu qui n’est largement pas suffisant en termes de « porter à connaissance ». La démarche Concert’eau lancée par la Métropole nous semble intéressante parce qu’elle va apporter des arguments techniques, politiques, humains qui nous permettront de nous confronter les uns aux autres ; sur cette base, il faudra faire en sorte que les élus qui seront en décision, principalement les élus de la Métropole et l’Etat, prennent une décision véritablement éclairée. Je le répète, ce ne sera certainement pas la meilleure décision mais ce sera la moins mauvaise. Merci.